Route Nord d’abord !

Route Nord d’abord !

Après un départ spectaculaire porté par une rare ferveur populaire, la régate a pris tous ses droits pour les quatre trimarans Ultimes de la Transat du Centenaire. Le début de course ne fait pas mentir les prévisions. Le paquebot, calé sur la route directe, turbine à 24-25 nœuds de moyenne quand les maxi-multicoques, empêtrés dans les calmes d’une dorsale anticyclonique, dépassent difficilement la petite dizaine de nœuds. C’est dire si ça ne va pas vite pour ces bolides des mers, en panne de vent et privés de leur si précieux carburant pour rivaliser avec ce géant d’acier qui avale les milles – à raison de 480 par jour - avec une régularité de métronome.

Une dorsale sur le dos

Comme prévu, les petits airs majoritaires dans les eaux de l’estuaire de la Loire ont continué de prendre du plomb dans l’aile au fil de cette première journée de course, obligeant les 22 marins sur les rangs à ne surtout rien céder, pour tracer leur trajectoire sur une route Nord qui l’a pourtant emporté à l’unanimité. « Ce matin on voit que les quatre bateaux ont choisi l’option Nord. L’option Sud ne n’est pas révélée réaliste à long terme. Mais ils doivent d’abord travrser une immense zone de calmes qui s’étend de la pointe des Cornouailles Anglaises jusqu’au large de la Péninsule Ibérique », commente Dominic Vittet, le consultant météo de la course, embarqué à bord du « liner » et aux premières loges pour apprécier in situ les conditions qui sévissent sur le plan d’eau.

Dépression au-dessus du jardin

Pour autant, dès demain, la course devrait radicalement changer de visage et prendre une toute autre tournure à l’approche d’un système dépressionnaire, qui doit permettre aux engins à voiles de franchement accélérer la cadence. « La nuit prochaine et les journées de mardi et mercredi s’annoncent bien meilleures et surtout plus musclées : plus les voiliers vont se rapprocher de la dépression, plus le Sud-Ouest va fraîchir (jusqu’à une vingtaine de nœuds) et basculer au Nord-Ouest, » ajoute le météorologue. Dans un ciel chargé de grains, les funambules devront virer et attaquer un grand bord vers le centre de l’Atlantique, leur jardin à tous. À ce petit jeu, le plus prompt à attraper ces vents propices aux hautes vitesses dans ses voiles pourra creuser de premiers écarts à coups d’accélérations fulgurantes.

 

Duel de tête

Pour l’heure, dans le sillage du paquebot, qui affiche déjà 250 milles d’avance, la bataille fait rage entre les six hommes du bord de Macif (François Gabart) et le quintette d’IDEC SPORT (Francis Joyon), qui s’échangent leadership au gré des classements. Cet après-midi, ils s tiennent, en visu et au contact, en une poignée de milles sur les eaux paisibles de l’Atlantique. Derrière, l’équipage de Sodebo Ultim’ (Thomas Coville), qui a concédé du terrain dans la première bataille de bords à tirer au plus près des côtes bretonnes, affiche un débours de 15 milles. Actual (Yves Le Blévec), le moins performant des quatre,  ferme logiquement la marche à 20 milles du duo de tête. Mais dans les prochaines heures aussi, les prémisses des vents frais attendus devraient lui permettre d’accélérer la foulée. Et pourquoi pas renverser la vapeur face au Queen Mary 2 qui devrait, lui, ralentir le tempo, dans ces conditions plus musclées. Pour l’heure, le commandant Christopher Wells tire le meilleur de ses quatre moteurs de 21 000 chevaux. Et la croisière bat son plein à bord du paquebot lancé, pied au plancher, sur la route qui mène à New York…